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Chronique d'une lesbienne.♥

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CHAPITRE 30 - PARTIE 1 : Et ça continue... (suite2)

Chronique d'une lesbienne.♥
C'est dans ce contexte de chaos sans mots que je fis une rencontre sur internet, une rencontre imprévue, un ange tombé du ciel, c'était le cas de le dire. Cette personne extraordinaire m'apporta beaucoup. Grâce à elle, je compris certaines choses dont je n'avais pas cerné l'importance jusqu'alors, mais surtout, je compris que j'avais de l'importance pour quelqu'un. L'attention qu'elle me portait me donna une force surhumaine. Je compris que je devais d'abord m'accepter pour pouvoir ensuite me défendre. C'est ainsi que je pris la décision de me battre pour défendre mon identité, ma cause, et celle de tous les autres jeunes adolescents qui vivaient la même chose que moi. A présent, mon seul regret est d'avoir accordé du temps à des personnes qui n'attendaient que ça, c'est d'avoir accordé du temps à des personnes qui ne le méritaient pas.
En revanche, j'ignorai encore que cette fille deviendrait plus tard ma copine, ma chérie. Mais quelle plus belle personne avoir à ses côtés que celle qui m'a sorti du trou du désespoir, de la souffrance et de la détresse dans lequel j'étais piégée?

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CHAPITRE 30 - PARTIE 1 : Et ça continue... (suite)

Chronique d'une lesbienne.♥
En effet, un soir après être rentrée du lycée, je me suis isolée dans ma chambre comme à mon habitude pour pouvoir me connecter sur Ask afin de passer le temps, comme toujours. Seulement, lorsque mon profil apparu devant mes yeux, j'ai constaté très vite que j'avais un grand nombre anormal de questions, ce qui n'était pas du tout habituel. Que se passait-il? Un harcèlement? C'est immédiatement ce à quoi j'ai pensé, même si intérieurement tout mon esprit luttait contre cette idée.
Très vite, sans attendre plus longtemps, je m'empressai de découvrir les questions que l'on m'avait envoyées. La surprise fut énorme, et encore, le mot était bien trop faible. J'étais bouche bée, complètement stoïque derrière l'écran de mon ordinateur. Mes prunelles étaient fixées, elles se remplissaient de larmes au fur et à mesure que les questions apparaissaient une à une devant mes yeux. Je me revois en train de les lire et les relire, plusieurs fois d'affilée comme si le mal qu'elles m'avaient faite n'était pas déjà assez fort.
"C'est une honte d'être lesbienne comme toi..."
"J'espère que tout le monde t'insultera au lycée..."
"Ta mère doit avoir peur de toi..."
"Quand je te vois au lycée, tu me dégoûtes vraiment..."
"Tu es dégueulasse, tu me donnes envie de vomir..."
"Tes amies, elles te craignent pas?..."
"Allez la lesbienne, à la prochaine au lycée!..."
Ces phrases furent particulièrement très dures pour moi, cela pouvait être les paroles de n'importe quelle personne de mon lycée, que je connaisse ou non. Et c'est justement cette idée-là qui me paralysait. Me rendre chaque matin dans un établissement où des personnes m'harcelaient anonymement sur internet m'était insupportable. Je devenais paranoïaque. Et si c'était lui? Ou elle? Je me faisais des idées sur tout le monde. Et encore, si cela ne se passait que sur internet.. mais non! Non, non et non, même au lycée, lorsque entre deux cours je traversai les couloirs pour aller d'une salle à une autre, j’entendais des chuchotements et des paroles déplacées "Regarde, c'est elle! C'est la gouine!". Ces harcèlements virtuels durèrent bien un mois ou deux. Chaque jour, une petite insulte, chaque jour, de nouvelles larmes, chaque jour, je gardai le silence, chaque jour, je m'enfonçai un peu plus dans mon désespoir. Combien de fois ai-je pu inonder mon oreiller de mes pleurs? Je l'ignore et je préfère ne pas le savoir.

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CHAPITRE 30 - PARTIE 1 : Et ça continue...

Chronique d'une lesbienne.♥
Peut-être avais-je encore une fois espéré trop vite? Peut-être avais-je une fois de plus souhaiter l'inespérable? Je pensais que le soutien apporté par mes deux camarades de classe me rendrait plus forte, plus résistante aux pressions. En fait, je m'étais sur-estimée, l'ardeur que je pensais m'habiter n'était qu'une illusion, rien qu'une illusion. Mentalement, j'étais toujours aussi fragile et sensible aux critiques et aux regards que je croisai tout au long de la journée, des regards qui me rabaissaient en m'humiliant par plaisir.
Suite à ces épisodes tumultueux du tag et de mon coming-out inconsciemment provoqué, je sentis qu'une vague de ragots était en train de se propager au lycée. C'était assez troublant cette tension omniprésente autour de moi, ces regards qui en disaient long, cette lourdeur indescriptible et insoutenable qui flottait dans l'air, comme le temps oppressant et irrespirable avant un orage. Et comme si la situation n'était pas assez délicate pour moi, alors que j'aurai dû me faire discrète et me faire oublier, je fis l'erreur de m'inscrire sur un site que je considère aujourd'hui comme très dangereux si on ne sait pas s'en servir correctement. Il s'agit de "Ask". Pour ceux qui ne connaîtraient pas vraiment le principe de ce site, la personne qui s'inscrit dispose d'une page avec un pseudo, une photo de profil, des amis, jusque là comme Facebook. En revanche, là où ce site devient très risqué, c'est que la personne inscrite peut recevoir des compliments, des questions, des remarques, des avis, bref n'importe quel type de paroles, de la part d'une autre personne sans que celle-ci ne dévoile son identité. Ainsi, chaque internaute peut alors insulter quelqu'un de son choix de façon totalement anonyme sans être contraint à indiquer son prénom ou une quelconque information permettant de l'identifier.
C'est exactement ce qui m'arriva. Au début, je me connectai sur ce site uniquement pour décompresser après ma journée de cours, sans doute pour faire passer le temps lorsque je m'ennuyais ou que je n'avais rien d'autre à faire, ou alors pour me divertir et tenter d'oublier tout le poids intolérable auquel le lycée m’enchaînait, moi et mon esprit. Mais, petit à petit, j'ai commencé à m'y accrocher jusqu'au jour où il m'était impossible de laisser s'écouler une journée entière sans m'y rendre au moins une fois pour faire un tour, je ne pouvais tout simplement plus m'en passer. J'appréciai cette ambiance de mystère qui régnait autour des questions anonymes que je recevais parfois. Seulement, je fus rapidement prise au piège, ce site internet referma ses griffes sur moi sans prévenir, sans crier gare. Son emprise m'étouffa inexorablement sans que je puisse sentir la catastrophe arriver, et lorsque je pris conscience du danger que j'encourais, il était malheureusement déjà trop tard...

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CHAPITRE 29 - PARTIE 2 : Un peu de réconfort (suite2)

Chronique d'une lesbienne.♥
- "Tu te sens mieux?
- Oui, ça va aller merci beaucoup!
- Tu ne sais vraiment pas qui a pu faire ce tag?
- Non malheureusement je n'en ai vraiment aucune idée..
- Mince.. En tout cas, on voulait juste te dire que tu es très courageuse de t'assumer comme ça devant toute la classe, franchement bravo car ça ne doit pas être facile. C'est super ce que tu fais!"
Ces paroles me touchèrent énormément. Ce n'était peut-être pas "grand chose" mais quand tu es face à ce secret de qui tu es vraiment, quand ce secret est enfin dévoilé, son poids est alors multiplié par dix et la moindre des paroles bienveillantes prend une ampleur gigantesque dans ton cœur.
Tout ce que j'espérai à présent, c'est que tout se passerait bien par la suite au lycée comme à la maison..

CHAPITRE 29 - PARTIE 2 : Un peu de réconfort (suite)

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Toutefois, cette sérénité fut de courte durée car très vite, la réalité reprit le dessus par la force des choses. Je devais à présent rejoindre ma classe qui était en cours et je me suis alors souvenus que nous étions en EPS à cette heure-ci. Qui disait EPS disait que j'allais devoir arriver devant tout le monde en traversant l'immense gymnase. La simple idée de pousser la porte et de sillonner la grandeur de cette salle pour tous les rejoindre à l'autre bout de la pièce me terrifia. J'aurais voulu porter un masque, marcher dos à eux ou simplement rester dans les vestiaires, seule.
Je n'eus pas le choix de les rejoindre, alors je le fis. Oui, je le fis mais je me souviens à merveille de cette sensation de saleté et d'impureté qui me hantait à mesure que mes pas me rapprochaient d'eux. Mes yeux suivaient la trajectoire que j'empruntais. Restant inexorablement figé sur le sol, ils se refusaient de s'élever, ils se refusaient de faire face à tous ces autres yeux qui m'observaient déjà en silence.
Je fus alors vraiment surprise par certains qui eurent le courage de venir me voir en personne pour m'encourager et me féliciter. Me féliciter? Il n'y avait vraiment pas de quoi être félicitée. Félicitée pour quoi? Pour avoir pleuré? Pour avoir été faible? Pour avoir eu besoin de quelqu'un afin que mon homosexualité soit révélée au grand jour? Je ne me sentais nullement fière ou digne de félicitations. Néanmoins et malgré tout ce que je pensais de ma personne, certains furent là pour moi, certains dont je n'aurais à aucun moment soupçonné la présence dans ces moments difficiles.
Ce fut le cas de deux filles en particulier : Aleksandra et Célie, des filles avec qui je n'étais pas spécialement proche et qui ne connaissaient de moi que le strict minimum. Jamais je ne m'étais véritablement confiée à elles sur ce sujet par le passé et jamais je n'aurais pensé que je sois amenée à le faire un jour. C'est peut-être justement ce détail qui me toucha particulièrement de leur part: le fait qu'elles ne me connaissaient pas vraiment. Car même si je n'étais pas leur amie, même si on ne se disait pas bonjour et au revoir, elles avaient pris la peine de faire ce premier pas vers moi, ce pas que d'autres personnes que je considérais en revanche comme étant mes amis n'avaient pas pris la peine de faire. Elles avaient fait l'effort de venir me voir, juste pour m'encourager sans avoir peur de mon homosexualité. C'est ainsi qu'elles vinrent discrètement me voir pendant le sport, je fus d'ailleurs surprise de me retrouver en face d'elles et j'avoue avoir angoissé à l'idée de ce qu'elles avaient l'intention de me dire :

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CHAPITRE 29 - PARTIE 2 : Un peu de réconfort

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La fin de l'heure arriva bien vite! J'étais encore tellement chamboulée par les événements, si chamboulée que j'eus du mal à suivre le cours et à ranger mes affaires dans mon sac sans oublier que je ne parvenais toujours pas à détourner la tête de ma trousse de peur de croiser le regard d'une quelconque personne de cette classe, de peur alors de voir dans ces yeux que l'image qu'il avait de ma personne avait changé. Je me contentai simplement de regarder la table sous mes yeux baissés par la honte et le déshonneur.
La professeure vint me voir une fois les élèves sortis de la salle. Je remarquai sa silhouette qui se dessinait de plus en plus nettement dans le coin de mes yeux, jusqu'à ce qu'elle se fige, juste à côté de moi. Qu'allait-elle me dire? La réponse à ma question ne se fit pas attendre longtemps :
- "Alice, je pense que tu devrais rendre visite aux infirmières du lycée, tu as besoin de parler et de te soulager, ça te ferait du bien j'en suis certaine. Tu sais, elles sont aussi là pour écouter les élèves et pas uniquement pour les soigner. Ce qui se dit entre vous est strictement confidentiel elles sont tenues au secret professionnel donc elles n'en feront part à personne je peux te l'assurer, pas même à tes parents si tu ne souhaites pas qu'ils soient au courant. Et puis, je te ferais un mot pour que le professeur que tu as après ne te compte pas absente, tu rejoindras la classe une fois l'entretien terminé. Tu veux?"
Je ne l'aurais pas pensé mais c'est ce que je fis! Je leur rendis visite immédiatement après la fin de ce cours sans grand espoir et sans grande conviction que cela me serait utile et m'aiderait à me sentir mieux. Je m'étais trompée, oui je m'étais trompée car elles me furent d'une grande aide et d'un grand soutien. La discussion que nous avons eue dura bien 1 h. Elles prirent de leur temps pour être à mon écoute et cela me toucha particulièrement. Je ne sentis nul jugement enfoui au sein de leur regard, bien au contraire, tout ce que je ressentais dans leurs yeux, c'était de la compassion, de la gentillesse et du dévouement. Chacune de leurs paroles était empreinte de réconfort. C'est à partir de ce jour-là que mon regard sur les infirmières du lycée fut bouleversé. Avant, je ne les pensais pas si impliquées lors de ces moments d'écoute et de besoin de la part d'un élève. Désormais, j'avais conscience de leur importance et je sus que ce ne serait pas la dernière fois que je leur rendrais visite.
Je repartis en cours, presque sereine. Le travail que les infirmières avaient accompli sur moi était incroyable. Je me sentais libérée, libérée de toute la honte que je ressentais à mon égard il y avait de cela une heure à peine.

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CHAPITRE 29 - PARTIE 1: Un coming-out provoqué (suite3)

Chronique d'une lesbienne.♥
Je n'en ai jamais voulu à ma professeure pour avoir provoqué ce coming-out qui était totalement imprévu, même sur le moment présent. Il s'agissait d'un bête malentendu et elle avait pensé bien faire, et elle avait bien fait! Si un jour elle lit ces mots, je veux qu'elle sache que je lui en serais éternellement reconnaissante, même si elle le sait déjà, et que je la remercie encore du plus profond de mon cœur car elle m'a permis d'accomplir ce que je n'aurais jamais été en mesure de réaliser toute seule. Merci.

CHAPITRE 29 - PARTIE 1: Un coming-out provoqué (suite2)

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C'est alors que la professeure laissa échapper une phrase hors de ses lèvres, une phrase totalement imprévue dont je n'avais soupçonné la possibilité à aucun instant.
- "Alice assume la personne qu'elle est, elle assume sa différence, et c'est quelque chose qui n'est pas évident dans cette société je vous l'assure. J'espère que vous serez là pour elle dans ce moment qui est loin d'être évident."
Quelle catastrophe ! Elle venait tout juste de donner la certitude de mon homosexualité à toute la classe! Je compris trop tard que lorsqu'elle m'avait demandé si je voulais qu'elle parle à la classe, elle avait pensé que je m'assumais déjà! Il ne m'était absolument pas venu à l'esprit qu'elle affirmerait en public ce que j'étais et ce que j'avais toujours pris soin de cacher! Moi qui ne m'acceptait et ne m'assumait absolument pas, je fus entièrement foudroyée par ses paroles. Mon souffle s'arrêta presque subitement, ma respiration cessa instantanément, j'étais en suspension au milieu de tous dans cette salle qui devenait étouffante pour moi, je me sentais comme une bête prise dans un enclos. J'endurais le tremblement de mes mains que je serrais de toutes mes forces sous la table. Une boule d'angoisse me noua le ventre. Une douleur pris le contrôle de mon corps, une douleur que je ne parvenais même plus à ressentir. Mon regard vint se poser dans le vide, sur la blancheur apaisante du mur qu'il y avait sur ma droite, le seul dont je ne risquais pas de croiser le regard. Elle venait de provoquer mon coming-out. Je n'avais plus le choix, je devais m'assumer à présent, je ne pouvais plus revenir en arrière, plus après ça. La classe semblait ressentir tout mon mal-être car elle resta profondément silencieuse et respectueuse. Je sentais que beaucoup de regards m'avaient balayé furtivement mais beaucoup de regards n'avait aussi pas eu le courage de venir simplement se poser sur moi, gênés par cet instant délicat.
Je sentais les larmes qui naissaient dans le coin de mes yeux d'où elles allaient s'échapper d'une minute à l'autre. Alors que je retournai le regard en direction de ma professeure, elle plongea ses yeux dans les miens et devant tous, elle clôtura son discours doucement :
- "Tu es très courageuse, tu as tout mon respect".
Cette déclaration provoqua en moi quelque chose d'inqualifiable. C'était l'aboutissement de nombreuses années d'angoisse et d'appréhension à l'idée qu'un jour on saurait que j'étais homosexuelle. Je me mis à pleurer silencieusement sans pouvoir m'arrêter ni même expliquer tout ce qui traversa mon cœur, c'est toute une multitude de larmes que j'avais gardé prisonnières durant toutes ces années que mes prunelles laissèrent s'échapper en un instant. Ma voisine passa sa main sur mon bras et même avec ma vue brouillée par ces petites perles qui s'enfuyaient par dizaine, je réussis à distinguer son sourire réconfortant.

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CHAPITRE 29 - PARTIE 1: Un coming-out provoqué (suite)

Chronique d'une lesbienne.♥
Je sentais quelques regards perplexes qui se tournaient un à un dans ma direction. La pression montait furieusement en moi, c'était comme si je pouvais la palper, elle faisait partie de moi. La professeure me regardait parfois comme pour me faire savoir qu'elle me soutenait.
Soudain, elle éleva son bras qui, à son tour, portait le poids de cette fameuse photo du tag qu'elle avait soigneusement gardé avec elle, cette photo que j'avais moi-même précédemment levé avec souffrance pour la porter jusqu'à ses yeux. Voilà que tous savaient ce qui m'était arrivé. Tant que personne n'apprenait que j'étais véritablement "gouine" comme l'inscription le révélait, à ce stade, le reste m'était égal.
- "Vous voyez peut-être mal pour ceux qui sont assis au fond mais c'est la photo d'un tag où il est inscrit "Alice Reynaud sale gouine" et qui a été fait au lycée sur la terrasse au-dessus du bâtiment de la vie scolaire surplombé d'une représentation grossière d'Alice justement... Voilà vous n’étiez certainement pas au courant mais une personne a écrit ceci dans l'enceinte du lycée, c'est pour ça que nous sommes tous concernés ici. Je ne suis certainement pas en train de soupçonner quelqu'un de cette classe et je ne souhaite pas le faire loin de là, d'ailleurs Alice elle-même m'a expliqué qu'elle n'avait aucune idée de qui il pouvait s'agir. Je suis juste là pour rappeler que ce genre d'insultes est inacceptable. La sexualité de quelqu'un est quelque chose de privée et d'intime qui ne concerne personne d'autre que la personne elle-même. Nous n'avons pas à juger quelqu'un sur ça, c'est intolérable et en tant que professeur principal je me dois de ne pas laisser passer ce genre de choses. Nous ne vivons plus à l'âge de pierre, il faut apprendre à être tolérant envers les différences de chacun car la différence n'est pas mauvaise pour la société, elle est nécessaire, chacun doit pouvoir trouver sa place quel qu'il soit, tel qu'il est venu au monde. Je me fiche de savoir si le responsable se trouve dans cette salle, tout ce qui m'importe c'est que si c'est le cas, cette personne saura comprendre que ce genre de propos n'a pas sa place dans ce lycée, tout comme à l'extérieur."
Au fur et à mesure que la professeure prononçait ces paroles, la classe devenait de plus en plus calme, elle était absorbée par son discours, personne ne parlait, personne ne chuchotait, personne ne laissait échapper une réaction incontrôlée ou encore une simple respiration. Ce calme m'oppressait imperturbablement.
Que pensaient-ils tous? Me prenaient-ils pour une folle ? Une lâche? Après tout, c'était peut-être ce que j'étais, car jusqu'à preuve du contraire, j'étais bien venue me plaindre et tout "balancer" non?

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CHAPITRE 29 - PARTIE 1: Un coming-out provoqué

Chronique d'une lesbienne.♥
Je n'aurais jamais pu imaginer ce qui allait alors se passer ce jour-là, je n'aurais jamais pu concevoir l'étendue de tout ce que cela changerait en moi ce jour-là et pour mes prochaines années. Jamais.
Nous étions encore dans le couloir en train de rejoindre la classe, muettes et précipitées par tant d'émotions. Ma professeure semblait plongée en pleine réflexion, je sentais que beaucoup de choses lui traversaient la tête, elle se mélangeait entre toutes ces pensées, son esprit se balançait d'une idée à une autre. Je ne pouvais pas en dire autant de moi. J'étais complètement incapable de penser, je ne parvenais pas à concentrer mon attention sur quelque chose de précis, j'étais en proie à l'incompréhension et à l'anxiété sans cesse grandissante. Alors que l'on s'apprêtait à entrer dans la salle toutes les deux, elle me stoppa soudainement dans mon élan en laissant s'échapper mon prénom:
- "Alice.. Attends!"
- Oui? Qu'y-a-t-il?
- Cela fait quelques minutes que j'y réfléchis, est-ce que tu veux que je parle à la classe?
- Euh.. De quoi voulez-vous leur parler?
- De ce tag ? Car ils ne sont pas au courant si? Ce n'est pas que je soupçonne un élève en particulier bien sûr que non, comme toi, je ne te cache pas que je n'ai aucune idée de qui a pu faire ça, mais ça ne me coûte rien de leur en parler et cela me permettra de rappeler certaines petites choses.
- Non non, ils ne sont pas au courant, enfin je pense car peut-être qu'ils ont eu le temps de voir le tag, je ne sais pas exactement de quand il date. Si vous souhaitez leur parler, faites-le, je vous laisse faire."
Je ne savais pas vraiment si j'avais raison de la laisser faire car je ne voulais surtout pas que la classe croie que j'incriminais quelqu'un en particulier, je ne voulais pas non plus que l'on me plaigne et que l'on s’apitoie sur mon sort. Par ailleurs, je ne souhaitais encore moins faire l'objet d'autant de regards une nouvelle fois. Seulement, je me laissai emporter par l'idée de ma professeure sans véritablement songer à ce qu'il pourrait se passer. J'étais égarée, qu'aurai-je alors à y perdre?
Une fois rentrées dans la salle qui regagnait peu à peu son calme, chacune de nous deux rejoignit sa place habituelle, moi parmi tous, elle devant tous. Ma voisine me questionna du regard puis soudain, les mots prirent le dessus:
- "Qu'est-ce qu'il se passe? Ça a l'air grave !
- Pas tant que ça non.. Je crois que la prof va vous en parler.."
Je n'avais à peine eu le temps d'achever ma courte explication qu'une voix imposante couvrit la mienne et s’éleva pour se faire entendre:
- "Bien, avant de commencer le cours, nous allons prendre le temps de discuter de quelque chose. Cela ne vous aura certainement pas échappé, Alice a rencontré un petit problème entre hier et ce matin, un problème au sein du lycée. Elle est venue m'en faire part et c'est quelque chose qui me tient vraiment à cœur alors je souhaite vous en parler un moment."

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CHAPITRE 28 - PARTIE 2 : Comment va-t-elle réagir? (suite)

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- "Qui a fait ça Alice?!
- Je ne sais pas, cela a beau n'être que des mots, ils me font vraiment mal, je ne sais pas si vous pouvez comprendre ce que je ressens mais ils m'ont vraiment atteinte et à part vous, je ne savais pas à qui en parler, je ne savais pas vers qui me tourner.
- Tu as bien fait, tu as vraiment bien fait, nous ne sommes pas là pour te juger, c'est inadmissible, accompagne-moi, nous allons aller voir le directeur, nous allons faire ce qu'il faut pour qu'il soit effacé."
Je n'eus à peine le temps de réaliser ce qu'elle venait de me dire qu'elle avait déjà tourné vivement les talons, le pas hâtif. Elle semblait prendre ce problème avec la même importance que s'il s'agissait d'elle et cela me réconforta énormément. Je la suivis presque difficilement, je distinguais les couloirs et les murs qui se bousculaient en défilant devant mes yeux brouillés par toutes les émotions qui naissaient une à une en moi.
Dans le bureau du directeur, tout se déroula très vite, c'est à peine si j'eus le temps de comprendre ce qui m'arrivait.
- "Tu ne sais pas qui a fait ça? Vraiment tu n'en as aucune idée? C'est grave, ce ne sont pas que des mots comme tu le dis, ce n'est pas qu'une insulte, ce sont des propos homophobes et ils sont punis par la loi.
- Vraiment, je n'ai aucune idée de la personne qui peut être à l'origine de tout ça. Je ne vois pas qui a pu écrire ceci...vraiment. Et puis, je ne sais pas si j'ai vraiment envie de savoir qui est l'auteur de ces mots car j'ai peur de la vérité. J'ai peur que ça soit quelqu'un qui m'est proche.
- C'est normal mais nous ne pouvons pas laisser ceci impuni alors si tu as une idée, reviens m'en parler, en attendant, on va s'occuper de le faire disparaître. Tu peux repartir en cours l'esprit tranquille".
C'est alors qu'il se passa l'impensable, c'est alors qu'eut lieu un imprévu. Alors que nous remontions dans la salle de classe toutes les deux, ma professeure me proposa quelque chose, quelque chose qui changerait ma vie, totalement.

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CHAPITRE 28 - PARTIE 2 : Comment va-t-elle réagir?

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Au moment même où je mis les pieds dans la salle de classe, pratiquement tout le monde était déjà là, en train de s'installer et de discuter à droite à gauche. Il faut dire que la sonnerie avait déjà retenti il y a plusieurs minutes mais j'avais eu tellement de mal à entrer et à me placer à la vue de tous comme une ridicule bête de foire qu'on a plaisir à observer et à juger. J'étais restée bloquée, complètement déroutée. Cela me mit une pression supplémentaire de les voir tous là, assis ou en train de s'asseoir, les yeux rivés dans ma direction consciemment ou inconsciemment. Je croisais le regard de plusieurs personnes.
Savaient-ils? Avaient-ils vu ce tag ou l'ignoraient-ils? Et si c'était cette fille-là qui m'observait discrètement du coin de l’œil ? Ou bien ce garçon qui ne détournait pas ses yeux des miens? Peut-être encore était-ce elle qui se disait être mon amie? Ou cette amie qui se jurait être comme ma sœur?
Sans comprendre ce qui me traversa l'esprit à cet instant, je me tournai subitement vers ma professeure comme si elle était mon unique secours, le visage déconfis, inquiète et indécise. Une atmosphère empreinte d'incompréhension et de craintes flottait autour de moi. Me jugerait-elle si je lui en parlais ? M'aiderait-elle? Est-ce que seulement elle pourrait me comprendre? Lui montrer cette photo signifierait en quelque sorte me dévoiler à ses yeux, à ses yeux qui devraient me supporter le restant de l'année.
Soudain, les mots m'échappèrent de la bouche, malgré toute la peur qui occupait mon esprit :
- "Il faut que je vous parle Madame, c'est vraiment important.
- Bien sûr Alice, attends, nous allons sortir dans le couloir si tu veux".
Aussitôt dit aussitôt fait, alors que je tournai le dos, presque soulagée, à tous en quittant la salle, elle se tourna rapidement vers la classe en leur demandant de garder le calme pendant qu'elle me consacrerait son temps et son écoute.
Je la vis alors venir jusqu'à moi, en prenant grand soin de fermer doucement la porte derrière elle. Quelque chose d'inqualifiable l'habitait, quelque chose que je n'oublierais jamais, pas même aujourd'hui, deux ans après. Elle semblait préoccupée, moi qui n'avais jamais sollicité son aide par le passé. Ses yeux se figèrent dans les miens, une certaine lueur rassurante se dégageait de ses prunelles et venait s’entrelacer à l'inquiétude qui régnait dans les miennes. Presque automatiquement lorsqu'elle fut devant moi, sans dire le moindre mot, mon bras se releva lentement, il soulevait le poids de toute une nuit de souffrance auquel ce misérable tag m'avait condamné et m'avait faite prisonnière, une nuit entière de souffrance concentrée dans cette seule photo de mon téléphone qu'à présent j'élevais douloureusement jusqu'à ses yeux.

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CHAPITRE 28 - PARTIE 1 : Que faire ? (suite)

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Certains affirmeront sûrement qu'il ne s'agissait "que" d'un tag, une plaisanterie que je ne devais pas prendre au sérieux, mais parfois, les mots blessent plus que les coups eux-mêmes et lorsqu'en plus, ils vous sont destinés, ils se révèlent être bien plus que ce qu'ils sont, ils se révèlent être bien plus que de "simples mots". La nuit ne fut pas de tout repos, je tournais en rond dans mon lit. Je ne savais pas encore ce que me réserverait le lendemain mais j'étais bien assez naïve pour penser que cela rentrerait dans l'ordre rapidement.
Oh oui, j'avais été encore trop naïve, une fois de trop. Ah, ce lendemain matin! Il restera certainement dans ma mémoire durant encore de longues années et j'ignorai totalement qu'il allait changer autant de choses chez moi !
Comment parvenir à décrire tout ce qui me passa par la tête? Comment faire comprendre à des personnes extérieures ce qu'intérieurement je ressentais?
Ce fut une panique générale qui me secoua. Oui, une panique, il me semble que c'est le mot adapté, du moins, c'est le premier à m'être venu à l'esprit pour décrire mon état de ce matin-là. A mesure que j'approchai du portail du lycée, la peur grandissait, comme de lourds cailloux qui s'installaient dans mon ventre et qui m’alourdissaient, des lourds cailloux qui m'empêchaient d'avancer et qui me faisaient un peu plus mal à chaque pas que je réalisais.
Très vite, je remarquai que quelque chose avait changé depuis la veille. Quelque chose était différent. Alors que j'étais tout juste à une dizaine de mètres du lycée, les regards se braquèrent instantanément sur moi presque subitement. Était-ce mon angoisse qui me jouait des tours ? Devenais-je parano? Non, je n'inventais rien, tout était réel. Alors que je passais devant elles, des filles se retournèrent toutes en même temps et me dévisagèrent avec un air de dégoût, un garçon qui fumait plus loin dans un coin chuchota à un autre quelque chose, et ils finirent par se tourner vers moi tous les deux, le regard hautain et méprisant, un groupe d'amis cessa de parler et m'observa marcher dans le silence le plus complet. J'essayai de m'effacer, de me faire toute petite face à ces personnes qui me déshumanisaient du regard et qui accentuaient ma différence. A présent, c'est comme si je pouvais la palper cette différence et je n'ose reparler de cette phrase qui est parvenue jusqu'à mes oreilles alors que je franchissais tout juste le portail : "C'est elle", phrase suivie d'un effroyable "Aaah" prononcé d'un ton écœuré.
Un vrai cauchemar.
Ma première heure de la journée allait se dérouler avec ma professeure principale. C'était peut-être le moment idéal pour que je saisisse l'occasion! Qui sait?

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CHAPITRE 28 - PARTIE 1 : Que faire ?

Chronique d'une lesbienne.♥
La nuit fut terriblement agitée. Même jusqu'au cœur de mes rêves, mes craintes me poursuivaient sans lâcher prise un seul instant. Je sentais que cette même image revenait sans cesse à moi et m'étreignait délicatement. Elle ne voulait plus jamais s'en aller, elle m'effleurait comme pour me faire comprendre sa présence. Elle s'interdisait de me laisser en paix, elle refusait de s'évaporer de mon esprit et de me quitter à jamais. Et lorsque j'étais enfin tirée de mes cauchemars, lorsque enfin j'étais délivrée des prises de mon sommeil, j'étais alors rongée par l'inquiétude de ce que serait le lendemain. Une angoisse et une colère énorme se métamorphosaient en une force dont je ne mesurais pas l'ampleur. Je détenais cette puissance entre mes mains, je le sentais sans en avoir réellement conscience.
Mais qu'allais-je faire de toute cette fureur? Je n'en savais rien encore. Mais quoiqu'il se passe, il ne fallait surtout pas que j'en parle à mes parents. J'avais bien trop peur de leur réaction et de la honte que je ressentirais devant eux. Que penserait ma mère? Que sa pauvre petite fille était désespérée à cause d'une insulte dégradante? Après tout, pourquoi pas. Seulement, j'avais du mal à y croire, je pensais surtout qu'elle s'imaginerait que j'étais fière d'être ainsi, que j'en avais parlé autour de moi avec joie et bonheur et que cela m'était retombée dessus avec ce tag malveillant, que je l'avais, en quelque sorte, "cherchée" en jouant avec le feu. Enfin, je ne peux pas prétendre que j'étais persuadée qu'elle réagirait de cette façon mais quoiqu'il en soit, je ne voulais pas risquer que cela arrive, je ne voulais pas lui faire honte plus que je ne lui avais déjà fait. Non, je ne dirais rien, je ne voulais certainement pas devoir affronter l'humiliation et la colère de sa prunelle par-dessus les dizaines d'autres regards ignorants qui me balayeraient de la tête aux pieds.
Qui donc avait pu écrire de telles choses à mon sujet? Et si c'était quelqu'un dont je croisais tous les jours le regard? Et si c'était quelqu'un qui m'était proche? Une amie? Quelqu'un de ma classe? Je l'ignorai totalement.
Comment des individus qui ne connaissaient rien de ma personne, de ma vie, de mon parcours et de mon combat pouvaient-elles se permettre de telles insultes? Comment quelqu'un peut-il se donner le droit de juger une personne sur ce qu'elle est avant même de se préoccuper de ses propres fautes? Et puis, l'homosexualité était-elle vraiment une faute après tout? N'était-ce pas tout simplement ma façon d'être? N'était-ce pas tout simplement ma façon d'aimer?
Ces questions fusèrent dans mon esprit et elles réveillèrent mon ressentiment de plus bel. A présent, le doute s'installait en moi. J'étais perdue, totalement perdue. Devais-je avoir honte de ce que j'étais? ou alors être fière? Avais-je raison d'avoir peur? Devais-je me défendre? Devais-je répondre à ces attaques ou les ignorer?

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CHAPITRE 27 - PARTIE 2: Qui a fait ça? (suite)

Chronique d'une lesbienne.♥
Son message était suivi d'une affreuse photo. Ce n'était pas réellement le message d'Amandine en lui-même qui m'avait mis dans tous ces états, mais c'était bel et bien cette image. Elle m'avait abandonné aux prises de cette angoisse, elle m'avait laissée déconcertée et bouleversée. C'était un tag, une représentation très grossière de ma personne surplombée par une inscription sombre et haineuse:
"Alice Reynaud, sale gouine".
Je venais de recevoir un nouveau coup. Une nouvelle blessure m'avait atteinte, une terrible blessure.
Le soir, alors que je tentai par tous les moyens de trouver le sommeil, je fus hantée par la même image qui, sans cesse, me poursuivait dans mes pensées. C'était comme si mon regard avait photographié ce tag, cette inscription. Même lorsque je fermais les yeux, le cliché réapparaissait devant mes paupières. Il me traquait tel un assassin, sans me laisser de répit.
"Alice Reynaud, sale gouine"
"Alice Reynaud, sale gouine"
"Alice Reynaud, sale gouine"
...
Je fus complètement désillusionnée. Le refuge que je m'étais forgée au sein du lycée venait de s'effondrer. Il n'y avait nul endroit où je me sentirai bien à présent, nul endroit où je ne serais pas jugée. Je compris que l'on m'avait démasquée pour de bon, je compris que ce refuge n'avait été qu'une éphémère illusion.
Dans la nuit, j'eus une idée, je devais faire quelque chose, le lendemain matin lorsque j'arriverai au lycée, il fallait que je réagisse, je me devais d'agir. il fallait que je le fasse.

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CHAPITRE 27 - PARTIE 2: Qui a fait ça ?

Chronique d'une lesbienne.♥
J'étais sous le choc.
J'étais désemparée, désemparée à tel point que je crus échapper mon portable. J'aurais juré que je l'avais senti s'échapper jusqu'à terre tandis qu'il était toujours au creux de ma main, fermement enserré par mes doigts encore tout tremblants. J'eus cette douloureuse impression que mes muscles tout entiers se relâchaient afin de le laisser filer loin de moi, comme si mon portable savait lui-même qu'il ne fallait absolument pas que mes yeux se posent à nouveau sur ce que j'avais vu. Je restais ainsi, complètement stoïque, peut-être bien quelques minutes, mais ces quelques minutes me parurent interminables et il me fallut beaucoup de temps pour prendre du recul afin de me remettre de toute cette effervescence d'émotions.
C'est ainsi que je revins à moi lentement, figée au beau milieu du trottoir, gênant les autres passants, le regard vide et profond, empreint d'anxiété et d'amertume, les yeux lustrés par des larmes qui se dessinaient une à une, chacune poussant les précédentes qui se détachaient jusqu'à ma joue où toutes ces petites perles de souffrance achevaient leur course et venaient s'écraser sans un bruit.
Je voulus relever mon bras afin de lire une seconde fois la réponse d'Amandine mais, étrangement, il semblait peser le poids le mille siècles comme si lui aussi voulait m'empêcher de me refaire du mal, de souffrir à nouveau. Moi-même, je savais que si je reposais à nouveau mes yeux sur ce message, un second coup viendrait à nouveau me blesser. Pourtant c'est ce que je fis tant bien que mal, je n'avais pas le choix.
Mais qu'espérai-je donc ? Que ce que j'observerai cette fois-ci n'aurait rien à voir avec ce que j'avais entrevu cinq minutes auparavant ? C'était complètement insensé et pourtant cette fine pointe d'espoir m’éleva au-dessus de toute crainte.
Mes espérances bien insignifiantes chutèrent bien bas lorsque je compris que rien n'avait changé, bien sûr j'avais été stupide d'imaginer quoi que ce soit d'autre. C'était bien ce que j'avais vu, c'était bien le même message fracassant et assourdissant que celui entrevu à la première lecture :
- "Je suis allée m'asseoir sur un banc de la terrasse du lycée avec une amie pendant mon heure de libre, puis j'ai vu ça... Je me suis dit qu'il fallait que tu sois au courant si tu ne l'étais pas déjà, enfin moi en tout cas pour ma part, j'aurais aimé que l'on me tienne informée s'il s'agissait de moi".

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CHAPITRE 27 - PARTIE 1 : Que s'est-il passé? (suite)

Chronique d'une lesbienne.♥
En effet, pendant un moment, j'étais enfin parvenue à trouver une certaine paix intérieure lorsque j'étais en cours. C'était comme mon refuge, ma forteresse, l'endroit où je ne me sentais pas jugée et où je pouvais parler sans crainte avec des personnes qui ne savaient pas mon secret. Je commençai véritablement à détester les vacances, je me souviens d'ailleurs que certaines personnes me prenaient pour une folle lorsque je leur disais que je n'étais pas contente de finir les cours, je les comprenais mais eux n'ont jamais su comprendre la raison de ce mal-être et ils n'auraient jamais pu comprendre de toute manière. Ce n'était pas que j'affectionnais particulièrement les cours, les profs, ou je ne sais quoi d'autre, c'est simplement que le temps que je passais au lycée, je ne le passais pas à être chez moi et avoir cette boule au ventre, cette peur indescriptible de décevoir mes parents ou simplement d'entendre des remarques qui me blesseraient comme aucune blessure physique n'avait le pouvoir de m'atteindre. Je demeurais, en quelque sorte, en paix avec moi-même dans la classe. Je ne m'acceptais toujours pas, ça non, mais j'avais réussi à ne pas laisser ce poids me contraindre à la peur. J'avais cessé d'y penser à longueur de journée, tout simplement. Je tentais de m'accepter petit à petit telle que j'étais au fil des jours dans le but de lever ce fastidieux voile lorsque je me sentirais prête. J'avais trouvé la sérénité face à ce secret qui avait renoncé à réduire mes journées au mensonge, à l'inquiétude et à la peine.
C'est à ce moment-là de ma vie, lorsque j'étais enfin parvenue à trouver un refuge rassurant au sein du lycée, que ce refuge lui-même se referma sur moi, me piégea et me laissa désemparée, désillusionnée et abandonnée. C'est sans doute un de mes plus affreux souvenirs, un souvenir pour lequel j'aurais tout donné afin de l'oublier.
C'était un soir, un soir anodin à la fin des cours à 17h. J'étais sur le chemin qui me séparait de ma maison et je m'apprêtais à rentrer. Mon portable vibra, c'était un message d'Amandine, mon amie.
- "Alice, tu es au courant de ce qu'il y a eu?"
Ce genre de message m'effraie toujours alors je lui répondis très rapidement.
- "De quoi devrais-je être au courant?"
J'attendais sa réponse très impatiemment, je continuais à marcher en direction de chez moi en empoignant fermement mon portable dans les mains, je ne pouvais m'empêcher d'y jeter un coup d’œil toutes les cinq secondes, je sentais dans ma poitrine mon cœur qui accélérait sa course et qui s'adonnait à une lutte contre mon corps qui lui voulait ralentir.
Soudain, mon portable vibra.
Soudain, mon cœur éclata.
Je fus stoppée dans mon élan, incapable de réaliser le moindre pas supplémentaire. La réponse d'Amandine m'avait effondré. Je crus lâcher mon portable, totalement désorientée.

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CHAPITRE 27 - PARTIE 1 : Que s'est-il passé ?

Chronique d'une lesbienne.♥
Si l'on m'avait dit ce qui allait bientôt se passer, je ne l'aurais sans doute pas cru. Oh non, certainement pas. J'étais bien loin d'imaginer que le calme apparent qui régnait dans ma classe et au sein du lycée allait très vite être chamboulé par un torrent dévastateur, un déluge ravageur qui submergerait toute ma personne et qui me noierait au cœur de mes secrets et de mes silences.
A la maison, ce n'était pas terrible, vraiment pas terrible. L'ambiance était oppressante, mais ça, ce n'était pas le pire, le pire c'était que je savais pertinemment que c'était de ma faute. Si seulement j'étais normale n'est-ce pas. Ma mère souhaitait bien faire, avec du recul je n'en doute pas un seul instant, mais inconsciemment, elle me faisait beaucoup de mal, et cela, personne n'aurait pu le contredire ou simplement me comprendre. Cette situation me détruisait au fil des jours. La relation fusionnelle que j'avais entretenue avec elle jusqu'à présent était en train de m'échapper des doigts un peu plus chaque semaine qui s'écoulait, elle s'évaporait sans que je sache si je la retrouverais un jour. Nous cessions de nous parler comme avant, de rire, de plaisanter, de passer du temps ensemble les soirs. Parallèlement nous nous disputions de plus en plus souvent et les remarques se multiplièrent, en fait, nous étions beaucoup moins proches tout simplement, nous nous éloignions l'une de l'autre inévitablement. Elle trouvait le moyen, dans des situations des plus banales, de ramener ce fâcheux sujet sur la table. Très souvent, certaines phrases s'élevaient jusqu’à mes oreilles, des phrases que je connaissais par cœur comme par exemple "Alice, tu sais très bien que j'ai raison lorsque je dis que tu ne seras jamais heureuse avec une fille, ce n'est pas quelque chose d'acceptable, alors persévère dans la prière, Dieu t'aidera j'en ai la certitude". Je ne saurais décrire toute la colère et la violence que je contenais en moi. C'était ma mère et je l'aimais plus que je ne saurais le dire, mais malgré les liens du cœur et du sang, j'avais cette malheureuse impression qu'elle ne concevait pas l'amour de la même manière que moi, j'avais cette répugnante sensation que cet amour ne saurait jamais surpasser la différence et triompher du péché. Le seul endroit où je me sentais relativement bien, c'était le lycée car au moins, lorsque je me trouvais là-bas, je n'imaginais et n'apercevais pas les yeux de mes parents qui me regardaient avec pitié.

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CHAPITRE 26 - PARTIE 2 : Un corps qui n'est pas le mien (suite)

Chronique d'une lesbienne.♥
Je me souviens, quand j'avais 8-9 ans et que j'accompagnai ma mère dans les magasins, je passais toujours mon temps vers les vêtements des garçons. Elle avait beau me dire que ce n'était pas le rayon que je devais regarder, peu m'importait, je me sentais moi-même. C'était un rayon qui me plaisait, pour une fois je pouvais être qui je voulais, c'était ce qui comptait non? Je voulais m'habiller ainsi, c'est tout et personne n'aurait réussi à me faire changer d'avis et je ne vous parle pas de ma coiffure. Je rêvais de me couper les cheveux court, très courts, aussi court que je les avais eus lorsque j'étais petite. Je n'en pouvais plus. Je n'en pouvais plus de cette épaisse frange sur mon front, elle m'étouffait et elle ne me ressemblait pas, elle n'était pas faite pour moi et elle ne me correspondait pas. Je n'en pouvais plus de faire semblant d'être quelqu'un que je n'étais pas. Les personnes m'identifiaient ainsi mais moi seule savait ce qui se cachait derrière ce corps indésirable. La nuit, mes rêves se brouillaient, tantôt je m'inventais homme, tantôt je me concevais femme. Je me forçai à m'apprécier avec le physique que je laissais paraître et que la vie m'avait donné. Je m'habituais à me voir de cette façon car que penseraient les personnes qui me verraient les cheveux coupés? Feraient-ils le rapprochement avec l'affreux stéréotype bien connu? Et oui, ce cliché selon lequel une lesbienne a toujours les cheveux courts, ne prend jamais soin d'elle et se comportent comme un homme. Si je continuais ainsi, je risquais bien de tomber dans le piège que je m'aurais moi-même construit.
La rentrée...que dire? J'eus une classe qui, à première vue, semblait bien portante avec une ambiance plutôt rassurante. J'étais heureuse car je me sentais enfin sereine en présence des personnes avec qui je parlais, je faisais parfois l'objet de quelques regards déstabilisants mais qui n'étaient en rien comparables avec la pression que j'avais pu ressentir l'année passée. C'était, comment dire, comme-ci il n'y avait pas eu "d'année passée". Les personnes semblaient me découvrir, comme s'ils n'avaient jamais entendu parler de moi auparavant. En résumé, je n'avais pas à me plaindre car tout allait pour le mieux pour le moment, je semblais renaître de mon passé comme si la vie m'avait offerte une deuxième chance de ne pas être découverte. J'étais heureuse même si le mal-être ne tarissait pas. En effet, cet inimaginable inconfort était toujours là, il virevoltait telle une brume autour de moi, comme mon ombre qui ne me m'abandonnerait pas.
Tout allait pour le mieux? Mon Dieu, j'avais sans doute parlé trop vite une nouvelle fois. En effet, trois mois seulement après la rentrée de septembre, un événement déclencheur bouleversa mon quotidien et raviva des blessures qui n'avaient pas encore cicatrisé. Un événement qui, sans le savoir, m'affligerait des contrecoups bien mauvais, un événement qui changerait ma vie à jamais.

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CHAPITRE 26 - PARTIE 2 : Un corps qui n'est pas le mien

Chronique d'une lesbienne.♥
Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'un gène indescriptible était progressivement en train de s'installer en moi et de prendre le contrôle de toute ma personne. Un malaise pointait le bout de son nez chaque jour en me tapotant l'épaule, comme pour me rappeler que j'étais une intruse qui n'avait rien à faire ici entre les murs de cette maison, comme pour me remémorer la tâche que je représentais au milieu de la pureté, ou encore le loup infect, immoral et perverti parmi les saintes brebis. J'avais cette répugnante sensation d'incarner le péché au sein des personnes sacrées. Quelqu'un ou quelque chose que je ne saurais dénommer ni expliquer espérait me faire croire que j'étais en proie à une maladie que je répandrais à ceux que je toucherais. Une maladie.. qu'est-ce qu'il ne faut pas entendre! Si j'étais malade, je pense que je serais la première à être au courant, mais malgré tout, le doute persistait en moi et je sentais que mon amour-propre s’émiettait au fil des jours. J'étais en train de perdre mon sens de la dignité. Oui, je ne me sentais plus digne d'être un être humain. Je me doute bien aujourd'hui que mes parents ne réalisaient pas encore à l'époque l'ampleur de la honte qui m'habitait à chacune des fois où mon regard croisait le leur. Il n'en demeure pas moins que j'aurais, sans hésiter, préférer cent fois disparaître plutôt que de continuer à leur faire supporter ma différence refoulée.
Toutefois, au fil des semaines, un sujet bien plus déstabilisant me préoccupa l'esprit. J'allais faire ma rentrée en classe de première en septembre. J'avais eu mes 16 ans depuis peu, j'étais donc plongée en plein milieu de mon adolescence, ce qui expliquait que depuis un certain temps, ma poitrine commençait à se développer petit à petit et mon corps de femme se dessinait peu à peu. Quelle catastrophe! Je me souviens à merveille de la sensation qui m'envahissait à la vue de mon physique... Parfois, lorsque je passais devant le miroir, je me serais défigurée si je l'avais pu, si seulement j'en avais eu la possibilité. Je me sentais comme une étrangère captive d'un corps qui n'était pas le mien, ou alors seulement par défaut. Des ab-dominos, des muscles, un torse, des pectoraux c'était tout ce que je souhaitais pour moi. A présent, je serais contrainte à porter toute ma vie ce détestable sous-vêtement qu'on appelle un soutien-gorge. J'eus du mal à m'y faire, moi qui avais toujours saisi les moindres opportunités pour être torse nu dans mon enfance que ça soit à la plage, la piscine, ou simplement chez moi l'été.

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CHAPITRE 26 - PARTIE 1 : Les réactions se réveillent (suite-2)

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- Je dis ça pour ton bien, je dis ça parce que je t'aime! Tu aimerais que je te dise "c'est bien ma fille je suis contente pour toi"? Non je ne peux pas te dire ça car ce n'est pas ce que je pense, je suis désolée! Prends ta Bible, regarde le passage de Lévitique 20:13. Il est dit "Si un homme couche avec un homme comme on couche avec une femme, ils ont fait tous deux une chose abominable; ils seront punis de mort: leur sang retombera sur eux". Et ce n'est pas le seul passage : 1 corinthiens 6:9-10 dit que les homosexuels n'hériteront pas du royaume de Dieu Alice. Un homosexuel peut changer ! Nous avons des exemples de chrétiens homosexuels qui ont changé pour plaire à Dieu et le servir. La Bible dit que Dieu est amour, alors s'il est amour ne crois-tu pas qu'il souhaite que tout le monde accède au paradis? Ne crois-tu pas qu'il donnera la possibilité aux homosexuels de changer?
- Tout ce que je sais, c'est qu'il ne m'a pas aidé jusqu'à présent, et pourtant Dieu sait à quel point je l'ai prié tout les soirs sans cesse, en l'implorant en pleurs et à genoux. Dieu sait que je suis sincère lorsque je lui est demandé de m'aider à changer. Et j'ai l'impression qu'il ne m'a même pas entendu.
- Dieu accordera une réponse à tes attentes et à tes demandes en temps voulu, il faut que tu patientes et que tu redoubles d'efforts, que tu lui prouves que tu es persévérante. Continues à le prier, ne lâches pas. Je veux que ton bonheur et c'est pas en étant homosexuelle que tu seras heureuse, crois-moi."
Cette conversation me remua considérablement. Je compris que ma mère n'avait pas bien accueilli la nouvelle et qu'elle était encore bien loin de l'accepter. Je perçus en elle une force déterminée, une force indescriptible. Elle voulait que je change et elle serait prête à beaucoup pour arriver à cela. J'avais l'impression que j'avais commise une grave erreur en me dévoilant aux yeux de mes parents. Je regrettai considérablement ce jour où j'avais eu le courage de lever ce voile et j'aurais tout donné pour remonter le temps et faire tout ce qui m'était possible pour que jamais ça n'arrive.
La rentrée en première, c'était une étape que j'appréhendai particulièrement mais je ne saurais expliquer pourquoi même si je pense que l'histoire de l'année passée avec Annah y était pour quelque chose. Les rumeurs et les événements auxquels je m'étais heurtée en seconde contribuaient à alimenter ma peur et mon angoisse du renouveau, de la découverte d'une nouvelle classe et de nouveaux regards.

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CHAPITRE 26 - PARTIE 1 : Les réactions se réveillent (suite-1)

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- Maman, tu n'as pas entendu ce que papa a dit ? Je ne le suis pas devenue, je l'ai toujours été. Tu me connais mieux que personne tu devrais savoir que je n'invente rien. Pourquoi je l'inventerais? Tu sais, lorsque vous m'avez reparlé de cette fameuse journée de carnaval en maternelle, c'est tout un tas de souvenirs qui sont revenus à la surface et j'ai compris que je ne m'étais pas trompée, j'ai compris que je l'avais toujours été.
- Bon, peut importe que tu le sois depuis le début ou que tu le sois devenue, ça ce n'est pas important, ce qui m'importe c'est ce que tu veux être plus tard. Tu penses que les homosexuels sont des personnes heureuses? Ce sont les personnes qui détiennent les plus forts taux de suicide et qui subissent le plus d'infidélités dans leur vie de couple. Ce n'est pas moi qui l'invente, c'est les statistiques. Et tu sais pourquoi? Parce que Dieu nous a créé afin qu'on soit complémentaires. Pourquoi, à ton avis, Dieu a-t-il crée Adam et Ève? Pourquoi pas deux Ève ou deux Adam? Un homme doit vivre avec une femme et vice versa. Deux femmes ou deux hommes ne peuvent pas être heureux ensemble ni construire un avenir stable et durable. Ils ne peuvent même pas avoir des enfants naturellement, pour cela il faut qu'ils fassent appel à des techniques médicales donc ça veut bien dire qu'il faut un homme et une femme pour donner la vie! Il faut absolument que tu te battes contre ça. Ce n'est pas ce que Dieu veut pour les humains. Ce n'est pas naturel! Ce n'est pas un mode de vie acceptable pour un chrétien qui souhaite plaire à Dieu et tu le sais.
- Maman, ça me blesse beaucoup ce que tu dis, je n'ai pas choisi d'être ainsi..Je m'en fiche des statistiques, et d'ailleurs je ne me base pas là-dessus. Peut-être que s'il y a autant de suicides chez les homosexuels c'est parce qu'on leur fiche pas la paix après tout. C'est pas facile pour toi mais ça ne l'est encore moins pour moi. Je pensais que tu l'avais compris mais dans tes paroles, tout ce qu'il en ressort c'est que tu t'entêtes à croire que je peux changer. Mais je ne peux pas changer, j'ai essayé. Je le sais! Tu crois que ça me plait d'être ainsi? Tu crois qu'un beau matin, je me suis réveillée en me disant "Tiens aujourd'hui, j'ai décidé de devenir lesbienne!" Tu crois que je n'ai pas angoissé avant de te le dire? Tu crois que je suis fière d'être homosexuelle? Et pourtant oui, j'aimerais être fière, on devrait tous pouvoir être fier de qui on est mais certaines personnes ne pourront jamais l'être à cause de tout ceux qui aimeraient imposer leur conception du monde et de la vie.

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CHAPITRE 26 - PARTIE 1 : Les réactions se réveillent

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Durant les deux mois de vacances d'été qui clôturèrent mon année de seconde, je ressentis un changement d'attitude de la part de mes parents et en particulier de la part de ma mère. C'était comme si elle se réveillait d'un long et profond sommeil, comme si l'annonce de mon homosexualité l'avait contrainte et entravée aux fers d'une bombe à retardement, une bombe à retardement qui finirait par exploser tôt ou tard. C'est, comment dire, une sensation très déstabilisante. Ne pas comprendre pourquoi un tel changement, ne pas comprendre pourquoi rien avant et tout maintenant, ne pas comprendre tout simplement.
J'imagine que ma mère ne se rendait pas réellement compte du mal que m'affligeaient ces remarques au moment où elle me les adressait, j'imagine qu'elle souhaitait bien faire et que tout ce qu'elle recherchait était mon seul et unique bonheur, rien de plus. Je suppose qu'elle agissait ainsi par amour. Seulement, j'avoue que ce n'était pas exactement ce que je pensais sur l'instant même, ce n'était même pas du tout ce que je pensais à vrai dire.
Un soir, alors que j'écrivais mes sensations, que je décrivais mes peurs et mes angoisses et que je révélais mes impressions et mes sentiments les plus enfouis sur mon petit journal, ma mère vint me voir dans ma chambre comme nous le faisions très souvent. Elle s'assit à côté de moi sur mon lit, silencieuse et lointaine, virevoltante dans ses pensées, calme et sereine. Elle semblait perdue entre une multitude de rêveries jusqu'au moment où elle brisa le silence qui s'était petit à petit installé :
- "Je ne pense pas que tu es vraiment homosexuelle Alice.. C'est ce que le diable veut te faire croire, c'est ce que Satan veut t'inciter à penser car il veut perdre le monde, il veut le déstabiliser, le détraquer et l'éloigner de la faveur de Dieu. C'est ce que tu penses toi Alice, mais tu ne l'es pas.
- Si maman... Tu sais, durant toutes ces années où j'ai tenu ceci caché au fond de mon cœur, j'ai eu le temps de me remémorer tout ces nombreux souvenirs, j'ai eu le temps de passer en revue toutes mes années, de me questionner sur ma personne et je t'assure que c'est ce que je suis, à mon plus grand regret.
- Alors si tu es homosexuelle comme tu le dis, tu ne l'es pas définitivement, tu l'es juste devenue momentanément car tu as sans doute été déçue des hommes, ou alors tu n'as tout simplement pas rencontré encore le garçon qui te plait, c'est sûrement ça, tu sais moi à ton âge, je n'avais pas encore rencontré le vrai amour. Un jour, tu rencontreras ce garçon qui te fera comprendre que tu n'as jamais été homosexuelle.

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CHAPITRE 25 - PARTIE 2 : "Je le savais depuis le début" (suite)

Chronique d'une lesbienne.♥
Cela nous paraissait évident. Tu aurais voulu être un garçon cela sautait aux yeux. Mais le jour où j'ai compris personnellement que tu étais ainsi, c'est le jour de ce fameux carnaval en maternelle où tu n'étais âgée que de quelques années. Tu portais fièrement ton costume de lutin que mamie t'avait confectionné. Oui un lutin, c'était toi qui avait fait ce choix et inutile de te préciser que tu avais rejeté l'idée d'un déguisement de princesse. Pendant longtemps après cette journée, pendant très longtemps, tu nous as énormément parlé de cette fille déguisée en blanche-neige, tu voulais que maman l'invite à dormir à la maison alors qu'on ne la connaissait même pas. Tu n'édifiais que des éloges d'elle. Tu n'avais que deux ans, mais j'avais déjà compris ce qui se passait. Je le savais depuis le début. Je l'avais senti."
Non, non il n'y était pour rien, personne n'y était pour quelque chose. Personne d'autre n'était à blâmer mis à part moi. Mon père avait fait de son mieux en tant que papa et lorsqu'il s'occupait de moi, il n'était animé que de l'intention de me rendre heureuse. Si c'était à refaire, je ne voudrais que rien ne change. Il m'avait apporté tout ce dont j'avais besoin dans mon enfance pour m'épanouir tout comme ma mère m'avait comblée et ne pensait qu'à me faire plaisir. Je n'avais manqué de rien. Lorsque mon père énonça cette journée de carnaval, ce fut toute une ribambelle de souvenirs qui revinrent à la surface dans ma mémoire, des souvenirs qui s'imposèrent dans un fracas monstrueux. Dans ma tête, je revis cette fille dans son beau déguisement évoluer dans la cour de récréation avec élégance et finesse. Je me revis la suivre et tenter de me rapprocher d'elle. Et je me souviens ce que je ressentis. Je compris que moi aussi, j'avais toujours su que j'étais différente.
Le temps passa, la situation avec mes parents resta plus ou moins stable un moment. Je fis ma rentrée en classe de première en septembre. Je n'ai jamais été aussi sûre d'une chose, c'est qu'à aucun moment je n'aurais pu imaginer que l'année qui s'ouvrait à moi serait l'année de ma vie la plus difficile que j'avais pu vivre jusqu'à présent.

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